mercredi 19 novembre 2014

Libres propos sur le sommet de la francophonie


 
Dans douze petits jours, la capitale sénégalaise accueillera le monde francophone. Le prétexte ; le sommet de la francophonie. Et Dakar « s’honore » pour la deuxième fois, après celui de 1989. Pour rappel, le choix porté sur notre capitale, exprimé lors de la session de Brazzaville, fait suite à l’administration de la preuve de l‘indéniable maturé politique du peuple sénégalais. Ce dernier venait d’opérer la deuxième alternance politique après celle du 19 mars 2000. Dès lors un sommet de dimension internationale apparait comme une récompense. Mieux, le continent africain sortait de ce qu’on a appelé « le chaud printemps arabe » et reste caractérisé par de fortes craintes sur l’ouverture démocratique de nombre de pays. Beau prétexte ! Belle cause parce que démocratie avons-nous dit !
Cependant, ceci n’est que la face cachée de l’iceberg. Le sommet de la francophonie est l’une des rares rencontres au monde – s’il n’est pas le seul –  à regrouper purement et simplement les communautés ayant en partage la langue de FRANCE. Le français – seul argument de la rencontre des 29 et 30 novembre à Dakar, parait trop léger – voire fallacieux – pour mobiliser toutes les énergies, les énormes moyens humains et financiers ainsi que le temps. Pire, il offre ni plus ni moins qu’une tribune de diagnostic situationnel de ladite langue afin de mieux peaufiner des stratégies de maintien et/ou de consolidation d’une place dans le bruyant concert de concurrence linguistique. En témoignent les nombreuses rencontres préparatoires tenues sous nos cieux.
Des thématiques calquées sur les franges sociales comme les jeunes, les femmes avec en toile de fond la place et le rôle de ces derniers dans la paix, le développement ont finis d’agacer plus d’un. Il ne se passe pas de semaine sans qu’on nous serve de reportages, de pages spéciales en plein journal télévisé ou en fin sur la RTS1. Et toutes les télévisions privées entrent dans la danse en se taillant de très belles parts dans la vaste et couteuse campagne publicitaire.
Sur un tout autre registre, le sommet de la francophonie n’est rien d’autre qu’une manifestation de la volonté néocoloniale. Ce constat justifie du reste les innombrables initiatives de contre sommet à l’échelle du continent. En effet, il traduit le verrou culturel de l’émancipation des anciennes colonies françaises. Malheureusement, les chefs d’Etat apparaissent comme de loyaux répondants de cette politique nostalgique de l’ancienne métropole.
Faisant de la vassalisation de leurs pays un axe majeur de leurs professions de foi ou des DPG respectives, les dirigeants africains se gargarisent d’un succès ou des conditions de succès du sommet en question. Partout où il s’est tenu, le chef de l’Etat et son gouvernement se sont démenés suspendant presque les autres chantiers vitaux. Par ces temps qui courent, les autorités au plus haut niveau ne parlent et n’agissent que francophonie. Ah oui ! c’est la France qui choisit le patron de l’OIF. Le SG sortant, le sénégalais Abdou DIOUF - fils spirituel du chantre de la négritude et aspirant mourir académicien français - n’a –t- il pas préféré vivre en France, comme son mentor SENGHOR, après la perte du pouvoir. Le déchu tyran Burkinabè Blaise COMPAORE n’avait –il pas été pressenti pour lui succéder avec la bénédiction de « Papa » François HOLLAND ?   
Tout ceci remet au gout jour certaines interrogations légitimes. Le sommet de la francophonie a-il une fois fixé un agenda économique favorisant un partenariat gagnant-gagnant entre les Etats membres ? Son format ainsi que son contenu restent – ils adaptés à la géostratégie mondiale ? Nécessitent – ils une mobilisation aussi forte des anciennes colonies aux multiples défis sécuritaires, sanitaires – l’épidémie à virus Ebola n’a suscité qu’un très tardif sommet sous régional de la CEDEAO - et de développement ? Quand est ce que l’Afrique osera – à défaut de boycotter la francophonie pour la bambaraphonie, la swalyphonie ou la wolophonie pour reprendre le brillant chanteur ivoirien Tiken Jah FAKOLI – imposer un nouveau format avec un contenu en phase avec la marche du monde ? Nos langues traditionnelles locales ont – elles une fois servit de prétexte à une rencontre même nationale ?
La colonisation d’alors se résumant en trois M : militaire, missionnaires et marchands ; celle  d’aujourd’hui, se décline en trois M : mercenaires, médias et multinationales. Le sommet biannuel de la francophonie, en tant que traduction du verrou culturel demeure le parfait trait d’union du nouveau triptyque !!!!     
 
                                                                  Babacar THIAM
                                                                  Juriste pubiciste

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